Etat général
La « Revue suisse »,
périodique destiné aux suisses vivant à l’étranger, publie ce mois-ci un
dossier documenté sur les rapports des Suisses et Suissesses avec la religion. Il
y apparaît que les Suisses sans religion sont 20 fois plus nombreux qu’il y a
40 ans. La grande majorité des fidèles considère que la foi est devenue moins
importante dans la vie quotidienne. Si la religion est présente dans les
médias, c’est plus pour se démarquer de l’Islam que pour réfléchir à sa propre
tradition.
Opinions
Le programme national de
recherche « Collectivités religieuses, Etat et société » a cherché à
analyser dans les 5 dernières années ce que recèle cette mutation profonde de
la foi des individus et de ce paysage religieux. L’étude confirme que pour une
grande majorité de la population, l’importance accordée personnellement à la
religion n’a cessé de diminuer depuis des années. Le nombre de distanciés a
fortement augmenté. On fait de moins en moins appel aux prestations des
Eglises. Une grande partie des croyants pensent que la foi ne doit pas être
vécue de manière extrême, ni être diffusée dans un esprit de missionnaire. Les
Suisses sont également d’avis que la religion relève de la sphère privée.
Paradoxe
L’importance accordée par les
Suisses à la religion a beau avoir diminué dans les valeurs personnelles, sa
présence dans la sphère publique s’est renforcée dans les dernières années,
surtout suite à l’évolution de la politique internationale. L’interdiction de
minarets ou de la burqa fait l’objet de vifs débats dans les médias. Mais le
christianisme aussi refait surface. Les politiques défendent l’autorisation d’accrocher
des crucifix dans les bâtiments publics et on déplore la faiblesse du
christianisme face à l’Islam (passé de 0,26% de la population en 1970 à 4,5%
aujourd’hui). Les thèmes religieux gagnent ainsi exagérément en importance dans
le domaine public, tandis que la religion devient toujours plus insignifiante
dans la vie des individus.
La problématique des Eglises
Face aux bouleversements
actuels, les grandes Eglises sont souvent sur la défensive. Si certains leur
reprochent d’avoir manqué la connexion avec le monde moderne, d’autres pensent
que leur perte de valeur est due à l’édulcoration de leur tradition et à une
trop forte adaptation à l’époque actuelle. Pour Jörg Stolz, la première grande
tendance est la séparation de la société et des Eglises. La baisse continuelle
de la présence des institutions religieuses dans les écoles, les hôpitaux et
les établissements sociaux, qui dure depuis des siècles, et la diminution de
leur influence sur la politique et le droit vont se poursuivre.
En revanche, l’individualisation
continue d’augmenter. Les individus ne sont plus liés pendant toute leur vie à
une couche sociale, une religion ou un domicile en fonction de leur
appartenance à une famille ou à un sexe. Une autre tendance vient du fait que
les valeurs telles que la discipline, la fidélité ou l’obéissance sont de plus
en plus reléguées au second plan dans le monde occidental, contrairement à la quête
du plaisir, des émotions et de la spontanéité qui se développe. Dans ce contexte,
les Eglises doivent faire face à une concurrence de plus en plus sévère avec le
monde séculier. La collectivité existe aussi dans les clubs de sport, ou dans
une chorale, et les activités spirituelles se retrouvent également dans le
bien-être, la psychologie populaire ou l’ésotérisme. Selon le théologien
Christoph Bochinger, « les Eglises ne font plus autorité sur les questions
de la vie. Aujourd’hui, on peut trouver d’autres réponses dans n’importe quelle
librairie… Le rôle des Eglises sur les questions de conscience n’est plus
déterminant… Bon nombre de valeurs de la démocratie moderne n’ont pas leur
origine dans l’Eglise »
Dans cette évolution du paysage
religieux, les Eglises libres s’en sortent mieux que les grandes Eglises
nationales, avec toutefois de fortes différences. Les communautés
charismatiques-missionnaires et les Eglises qui attirent les jeunes ont
enregistré une forte hausse. Dans l’ensemble, le nombre des fidèles des Eglises
libres est resté stable au cours de 20 dernières années. Mais la sécularisation
leur pose aussi problème. Dans les années 80, lorsque la religion avait encore
une forte influence, les Eglises libres réussissaient bien mieux qu’aujourd’hui
à gagner de nouveaux membres.
Un prochain article me donnera
l’occasion d’apporter quelques réflexions sur la situation !
Visitez : www.gillesgeorgel.com/
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