Un regard satellite
Les systèmes de positionnement par satellites actuels sont, dit-on, d’une précision si remarquable qu’ils permettent de donner la position géographique de leurs récepteurs à quelques mètres près. Preuve en est les GPS qui, guidés du haut du ciel, nous indiquent avec exactitude notre position sur la route. Si l’utilisation de cette technique a des avantages qui facilitent la vie quotidienne, elle interroge également. Chacun de nous, qu’il en soit conscient ou pas, est suivi à la trace. Vous pouvez nier vous être rendu à tel ou tel endroit… sauf que votre position a été trahie d’en haut.
Dieu, dit la Bible, regarde du ciel. Il voit tous les humains : Psaume 33,13. Il est fort possible que, dans quantité de situations, vous pensiez être seuls. Vous n’êtes pas fiers de ce que vous avez fait et, s’il y a une chose que vous espérez, c’est que personne ne le sache. « Ni vu, ni connu, vous rassurez-vous ! » Détrompez-vous ! L’œil de Dieu voit tout.
Alors qu’il venait de faire la connaissance de Jésus, Philippe rencontra un ami, Nathanaël. Enthousiaste, il lui dit d’emblée sa certitude que Jésus était le Messie annoncé et attendu par les prophètes. Nathanaël est sceptique ! Philippe ne cherche pas à le convaincre davantage. Il l’invite à faire lui-même la connaissance de Jésus. A peine Nathanaël arrive-t-il que Jésus fait l’éloge de sa droiture de cœur. Nathanaël s’étonne : d’où me connais-tu, demande-t-il ! Jésus lui répond : Avant que Philippe t’appelle, quand tu étais sous le figuier, je t’ai vu ! Convaincu, Nathanaël se met à son tour à suivre Jésus.
Que faisait Nathanaël sous son figuier ? L’Evangile ne nous le dit pas ! Ce qui est certain est qu’il était seul à ce moment-là. Ce qui s’était fait sous le figuier était un secret pour Nathanaël seul. Peut-être, celui-ci était-il en train de prier, de demander à Dieu quelque chose de précis ? Peut-être était-il en train de méditer et de prendre devant Dieu une décision solennelle ? Ou de penser à quelque chose de bon qu’il allait faire pour son prochain ? Nathanaël était un homme droit. Quoi qu’il en soit, il n’a pas pu garder son secret pour lui seul. Avant même qu’il connaisse Jésus, celui-ci l’a vu. Du premier coup d’oeil, il fut capable de dire tout ce qui était en lui.
La question se pose : sous quel figuier suis-je ? Et que fais-je sous ce figuier ? Le fait que Dieu connaisse tout de moi peut, d’une part, être rassurant. Dieu connaît ce que les autres ne voient pas : mes motivations, le bien que je peux faire incognito… Mais Dieu sait aussi tout ce que je fais de mal, de mensonger, d’inique en secret. Il connaît les pensées qui m’habitent, les projets que je conçois, les magouilles et les coups bas dans lesquels je trempe ! La précision du regard de Dieu dépasse de loin celle des satellites. Ceux-ci peuvent me situer physiquement. Ils ne peuvent deviner ce qui se trame en moi.
S’il est effrayant pour le pécheur, l’œil de Dieu est, par contre, toujours rassurant, pour le juste. Dans le même psaume, il est dit : l’œil du Seigneur est sur ceux qui le craignent, sur ceux qui attendent sa fidélité, afin de les délivrer de la mort et de les faire vivre pendant la famine : Psaume 33,17-18. Celui qui veut marcher dans la vérité, la droiture, la justice ou l’intégrité doit le savoir : Dieu le voit. Comme pour le méchant, l’œil de Dieu le suit à la trace. Cette hyper surveillance de Dieu sur le juste a un but : lui assurer toute la protection et le soutien dont il a besoin dans l’effort qui le porte.
Quel sentiment provoque en vous l’idée que Dieu vous voit, qu’il connaisse exactement votre position à cet instant ? Plus encore, qu’il connaisse vos états d’âme, vos pensées, ce que vous mûrissez au plus profond de vous-mêmes ? Les yeux de l’Eternel sont en tout lieu, observant les méchants et les bons, dit Salomon : Proverbes 15,3. Que cette conscience du regard pénétrant de Dieu vous pousse à reconnaître vos fautes devant Lui ! Il vous dira alors ce que Jésus a dit lorsqu’il a vu la femme adultère : Je ne te condamne pas. Va, et ne pèche plus : Jean 8,11 !
La conscience
Lorsque avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes,
Echevelé, livide au milieu des tempêtes,
Caïn se fut enfui de devant Jéhovah,
Comme le soir tombait, l'homme sombre arriva
Au bas d'une montagne en une grande plaine ;
Sa femme fatiguée et ses fils hors d'haleine
Lui dirent : « Couchons-nous sur la terre, et dormons. »
Caïn, ne dormant pas, songeait au pied des monts.
Ayant levé la tête, au fond des cieux funèbres,
Il vit un oeil, tout grand ouvert dans les ténèbres,
Et qui le regardait dans l'ombre fixement.
« Je suis trop près », dit-il avec un tremblement.
Il réveilla ses fils dormant, sa femme lasse,
Et se remit à fuir sinistre dans l'espace.
Il marcha trente jours, il marcha trente nuits.
Il allait, muet, pâle et frémissant aux bruits,
Furtif, sans regarder derrière lui, sans trêve,
Sans repos, sans sommeil; il atteignit la grève
Des mers dans le pays qui fut depuis Assur.
« Arrêtons-nous, dit-il, car cet asile est sûr.
Restons-y. Nous avons du monde atteint les bornes. »
Et, comme il s'asseyait, il vit dans les cieux mornes
L'oeil à la même place au fond de l'horizon.
Alors il tressaillit en proie au noir frisson.
« Cachez-moi ! » cria-t-il; et, le doigt sur la bouche,
Tous ses fils regardaient trembler l'aïeul farouche.
Caïn dit à Jabel, père de ceux qui vont
Sous des tentes de poil dans le désert profond :
« Etends de ce côté la toile de la tente. »
Et l'on développa la muraille flottante ;
Et, quand on l'eut fixée avec des poids de plomb :
« Vous ne voyez plus rien ? » dit Tsilla, l'enfant blond,
La fille de ses Fils, douce comme l'aurore ;
Et Caïn répondit : « je vois cet oeil encore ! »
Jubal, père de ceux qui passent dans les bourgs
Soufflant dans des clairons et frappant des tambours,
Cria : « je saurai bien construire une barrière. »
Il fit un mur de bronze et mit Caïn derrière.
Et Caïn dit « Cet oeil me regarde toujours! »
Hénoch dit : « Il faut faire une enceinte de tours
Si terrible, que rien ne puisse approcher d'elle.
Bâtissons une ville avec sa citadelle,
Bâtissons une ville, et nous la fermerons. »
Alors Tubalcaïn, père des forgerons,
Construisit une ville énorme et surhumaine.
Pendant qu'il travaillait, ses frères, dans la plaine,
Chassaient les fils d'Enos et les enfants de Seth ;
Et l'on crevait les yeux à quiconque passait ;
Et, le soir, on lançait des flèches aux étoiles.
Le granit remplaça la tente aux murs de toiles,
On lia chaque bloc avec des noeuds de fer,
Et la ville semblait une ville d'enfer ;
L'ombre des tours faisait la nuit dans les campagnes ;
Ils donnèrent aux murs l'épaisseur des montagnes ;
Sur la porte on grava : « Défense à Dieu d'entrer. »
Quand ils eurent fini de clore et de murer,
On mit l'aïeul au centre en une tour de pierre ;
Et lui restait lugubre et hagard. « Ô mon père !
L'oeil a-t-il disparu ? » dit en tremblant Tsilla.
Et Caïn répondit : " Non, il est toujours là. »
Alors il dit: « je veux habiter sous la terre
Comme dans son sépulcre un homme solitaire ;
Rien ne me verra plus, je ne verrai plus rien. »
On fit donc une fosse, et Caïn dit « C'est bien ! »
Puis il descendit seul sous cette voûte sombre.
Quand il se fut assis sur sa chaise dans l'ombre
Et qu'on eut sur son front fermé le souterrain,
L'oeil était dans la tombe et regardait Caïn.
VICTOR HUGO
Que sert-il à un homme de gagner le monde entier s'il perd son âme : Jésus