Analogie entre Jésus et la Bible
Analogie de nature, ou, si l’on veut, de
naissance. L’Esprit de Dieu engendre, par sa vertu miraculeuse,
dans le sein de
l’humanité, ce Fils que Dieu et l’homme pourront également appeler leur, et qui
doit rassembler l’une et l’autre nature dans sa personne avant de les
réconcilier sur la croix. Par là on peut dire également, en contemplant
Jésus-Christ : « Voilà l’homme » et « voilà Dieu ». C’est
l’homme, dans sa vérité, dans sa petitesse, dans sa faiblesse même ; et
pourtant, c’est Dieu, dans son essence, dans sa grandeur, dans sa puissance
infinie, sans que nul puisse expliquer comment la divinité et l’humanité s’unissent
en Jésus, ni indiquer où l’une finit et l’autre commence.
Un prodige, un miracle semblable a donné l’Ecriture
sainte au monde. le Saint-Esprit l’a engendrée dans le sein de l’humanité par
une sorte d’incarnation spirituelle, si l’on veut me passer l’expression ;
et il est sorti de là un Livre qu’on peut également appeler un livre des hommes
et le Livre de Dieu. C’est un livre des hommes, car on y sent l’esprit de l’homme,
le cœur de l’homme, la conscience de l’homme, et jusqu’à l’infirmité de l’homme ;
que dis-je ? on y sent tout cela non de l’homme seulement, mais de tel ou
tel homme, l’esprit de saint Jean et l’esprit de saint Paul, le cœur de saint
Jean et le cœur de saint Paul, l’infirmité humaine de saint Jean et l’infirmité
humaine de saint Paul ; cela est si vrai que si, par impossible, on venait
à retrouver aujourd’hui un livre apostolique perdu, nous n’aurions pas besoin d’en
lire plus de dix lignes pour décider s’il est de Jean ou de Paul.
Mais en même temps, c’est le Livre de Dieu :
on y sent une vertu divine qui le prouve à l’âme autrement et mieux encore que
par les miracles et les prophéties, qui ne se confond point avec la lumière et
la sainteté personnelle de l’auteur sacré, qui en fait un livre à part, inimité
et inimitable à moins d’un nouvel apostolat, et qui oblige tout homme candide à
rendre au Livre le témoignage que ces émissaires du sanhédrin rendaient à
Jésus-Christ : « Jamais livre n’a parlé comme ce Livre ! »[1]
Unité humaine et divine
Ce serait, selon nous, tenir un langage très
erroné, que de dire : certains passages, dans la Bible, sont de l’homme,
et certains passages, dans la Bible, sont de Dieu. Non, tous les versets, sans
exception, y sont de l’homme ; et tous les versets, sans exception, y sont
de Dieu ; soit qu’il y parle directement en son nom, soit qu’il y emploie
toute la personnalité de l’écrivain sacré.
Et comme saint Bernard a dit des œuvres vivantes
de l’homme régénéré, « que notre volonté n’y fait rien sans la grâce, mais
que la grâce n’y fait rien que dans notre volonté », de même il faut dire
que, dans les Ecritures, Dieu n’a rien fait que par l’homme et l’homme n’a rien
fait que par Dieu.
Il en est en effet, de la théopneustie (l’inspiration
divine) comme de la grâce efficace. Dans les opérations du Saint-Esprit faisant
écrire les saints livres, et dans celles du même Esprit convertissant une âme,
et la faisant marcher dans les voies de la sanctification, l’homme est, à
différents égards, entièrement passif et entièrement actif. Dieu y fait tout ;
l’homme y fait tout, et l’on peut dire, pour l’une comme pour l’autre de ces œuvres,
ce que saint Paul disait de l’une d’elles aux Philippiens : « C’est
Dieu qui opère en vous le vouloir et le faire : Phil
2,13. Aussi verrez-vous que, dans les Ecritures, les mêmes opérations
sont attribuées alternativement à dieu et à l’homme : Dieu convertit et c’est
l’homme qui se convertit ; Dieu circoncit le cœur, Dieu donne un cœur nouveau,
et c’est l’homme qui doit circoncire son cœur et se faire un cœur nouveau ![2]
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