Jacques Ellul
Jacques Ellul (1912 – 1994), docteur en droit fut révoqué par le régime de Vichy et participa activement à la Résistance. Philosophe, théologien, Jacques Ellul est un penseur incontournable du XXème siècle, dont la lucidité est à redécouvrir. Dans son livre « la subversion du christianisme », il aborde un sujet peu étudié, celui de l’influence de l’Islam sur le christianisme dans l’histoire. Loin de l’optimisme béat de nos philosophes actuels sur la bonne influence que pourrait avoir un Islam intégré à nos sociétés, Ellul nous ramène aux fondamentaux de l’Islam et nous démontre de manière magistrale, au travers des faits de l’histoire, leur incompatibilité avec le judéo-christianisme qui a forgé les valeurs de l’Occident. Extraits !
Religion-politique-droit
Je crois qu’en tout point l’esprit de l’Islam est contraire à celui de la Révélation de Dieu en Jésus-Christ. Déjà le fait fondamental : Dieu ne peut pas être incarné. Dieu ne peut pas être autre chose que le juge souverain qui ordonne à sa volonté toute chose. Et puis l’intégration absolue de « religion-politique-droit. » L’expression de la volonté de Dieu se traduit inévitablement dans du droit. Il n'y a pas de droit qui ne soit religieux, inspiré par Dieu, et réciproquement, toute volonté de Dieu doit se traduire en termes juridiques.
Le fait que, dans l’Islam, le juriste soit théologien, va donner une impulsion énorme à la juridicisation de la chrétienté. Le droit canon se multiplie à l’image de ce qui se faisait en Islam. Et si tout n’a pas été absorbé, c’est que les féodaux, les rois, restaient très hostiles à cette croissance du pouvoir de l’Eglise. Mais l’esprit juridique pénètre fondamentalement l’Eglise, et j’affirme que c’est à la fois sous l’influence de l’Islam et en réponse à ce droit religieux islamique… Or, ceci est bien connu en Europe, la prétention du roi ou de l’empereur, dès ce moment, sera d’être non plus le bras séculier de l’Eglise, mais le titulaire du pouvoir spirituel… Le pouvoir royal devient religieux non seulement par alliance avec l’Eglise mais par influence de cet Islam, qui est encore beaucoup plus une théocratie que ne le fut jamais l’Occident.
La guerre sainte
Doublant cette importance majeure du pouvoir politique, il y a bien entendu l’importance, la glorification de la guerre pour répandre la foi. Cette guerre est un devoir de tout musulman. Il faut que l’Islam devienne l’Universel. Il faut étendre non pas tellement son pouvoir mais la vraie foi à tous les peuples en les contraignant par tous les moyens, et forcément la guerre… La guerre est inhérente à l’Islam. Elle est inscrite dans sa doctrine, elle est tantôt un fait de civilisation, tantôt un fait religieux mais ne peut pas en être séparée.
Quand l’Empire devient chrétien, la guerre est mal tolérée par les chrétiens. Elle reste, quoique menée par un empereur chrétien, douteuse et mal jugée. Elle est souvent condamnée… Pratiquement, les chrétiens vont rester critiques à l’égard de la guerre, jusqu’à la pénétration flamboyante de guerre sainte. Autrement dit, quelles que soient les atrocités qui se sont produites dans les guerres menées par des nations dites chrétiennes, la guerre est toujours en contradiction essentielle avec l’Evangile, et les chrétiens le savaient toujours, plus ou moins…
La fameuse histoire de Charlemagne convertissant par la violence et à peine de mort les saxons n’est que l’exacte imitation de ce que l’Islam faisait depuis deux siècles… L’idée de guerre sainte est directement issue du Djihad musulman… la croisade est l’exacte imitation du Djihad. Y compris, par exemple, le salut garanti, assuré ; celui qui meurt dans le Djihad va tout droit au Paradis. Et ceci sera repris par les Croisés. Ce n’est pas une coïncidence, c’est une très exacte identification… Lorsqu’on lutte contre un mauvais adversaire avec les mêmes armes, les mêmes moyens que lui, on s’identifie forcément à lui. La juste cause est inévitablement corrompue par de mauvais moyens.
De la condition de la femme
Des Islamistes modernes affirment que la femme est totalement l’égale de l’homme, qu’elle est totalement libre, que l’Islam a été un mouvement de libération de la femme. Toutefois on peut dire quand même que nulle part la femme n’a été plus asservie qu’en terre musulmane. Les mariages arrangés pour des petites filles, la femme réduite à être l’esclave de l’homme dans les familles pauvres, la femme dans le harem chez les riches, la femme sans aucun droit, n’ayant aucun bien : tout cela est indiscutable. Par ailleurs la fameuse question de savoir si la femme a une âme, est une question posée en réalité par des théologiens musulmans. Avant la question soulevée par des théologiens arabes, il n’a jamais été question de cette affaire dans le christianisme.
Esclavage
Les musulmans ont déporté vers l’Orient beaucoup plus d’esclaves noirs que les Occidentaux. Au XIème siècle, il y avait quinze grands marchés d’esclaves établis par les Arabes en Afrique noire, descendant à l’Est jusqu’en face de Madagascar, et à l’Ouest jusqu’au Niger. La principale marchandise de tout le commerce musulman, c’est l’esclave du Xème au XVème siècle. En outre, ils avaient commencé à pratiquer la politique, dont les marchands européens ont profité, consistant à dresser les chefs africains les uns contre les autres, pour qu’un chef fasse des prisonniers chez ses voisins et les revende comme esclaves aux marchands arabes. C’est en utilisant cette pratique établie depuis des siècles que les marins occidentaux ont obtenu aisément des esclaves. Bien entendu, le fait en lui-même est affreux et anti-chrétien, mais nous sommes bien en présence d’une influence directe de l’Islam sur la pratique d’Occidentaux qui n’avaient plus de chrétiens que le nom
Colonisation
Depuis une trentaine d’années on a attaqué le christianisme comme inspirant la colonisation, on a fait grief aux chrétiens d’avoir couvert l’invasion du monde, d’avoir justifié les pratiques capitalistes, et la formule selon laquelle le missionnaire ouvrait la porte aux marchands est devenue traditionnelle. Sans aucun doute, on a raison. Sans aucun doute, jamais des chrétiens conscients et sérieux n’auraient dû accepter l’invasion des peuples du « tiers-monde », l’appropriation de leurs terres, leurs réduction en semi-esclavage (ou leur extermination), la destruction de leur culture.
Mais qui a inventé la colonisation ? L’Islam. Indiscutablement. La colonisation est la pénétration par d’autres voies que militaires, la réduction des peuples soumis par une sorte de traité de façon à ce qu’ils fassent exactement ce que le dominant attendait. Pour l’Islam, il y a deux voies de pénétration, la commerciale et la religieuse. Exactement comme cinq cent ans plus tard les Occidentaux.
Conclusion
Pour terminer, précisons bien, pour qu’il n’y ait pas de malentendu. Je n’ai pas du tout cherché à excuser ce que les Européens ont fait. Je n’ai jamais cherché à faire retomber « la faute » sur quelqu’un d’autre, et à dire que « les coupables », ce sont les musulmans et non les chrétiens. Il s’agit d’expliquer un certain nombre de perversions dans la conduite chrétienne. J’en ai trouvé le modèle dans l’Islam. Ce ne sont pas les chrétiens qui ont inventé la guerre sainte ou le trafic d’esclaves. Leur immense culpabilité a été d’imiter l’Islam. Il s’agissait tantôt d’une imitation directe (on suivait l’exemple de l’Islam), tantôt d’une imitation inverse, c’est-à-dire que l’on faisait la même chose que l’Islam, mais pour le combattre (par exemple la croisade). Dans ces deux cas, le drame a été l’oubli complet de la vérité de l’Evangile, le renversement de l’éthique chrétienne, au profit d’un comportement qui paraissait de toute évidence plus efficace.
Que sert-il à un homme de gagner le monde entier s'il perd son âme : Jésus